Chasseurs de tornades et de tournevis malgré nous !
Mardi soir, nous roulons tranquillement vers Banff, notre premier parc national ciblé. Le ciel est bleu, la route est belle en Illinois, nous nous dirigeons vers le camping « Yogi bear » pour la nuit, pour reprendre la route le lendemain matin. Comment ne pas être joviaux dans ces conditions quasi bucoliques ? Des gouttes de pluie se mettent à tomber du ciel qui s’assombrit devant nous et quelques éclairs semblent précurseurs d’un bon orage, mais rien pour nous inquiéter outre mesure.
Mais voilà que nos trois téléphones et la radio de la voiture émettent simultanément un son strident et nous annonce qu’une alerte de tornades est en vigueur dans notre région et qu’il faut rapidement se mettre à l’abri. En quelques instants, le ciel est devenu d’un bleu gris menaçant et les éclairs et la pluie se sont intensifiés de manière, avouons-le, inquiétante.
Nous quittons donc l’autoroute dans l’espoir de se trouver un abri. Ne sachant où aller, nous tentons simplement d’aller en direction inverse de la tempête qui prend de l’ampleur. Nous sommes maintenant dans une étrange noirceur qui fiche la trouille, surtout lorsque les éclairs d’une luminosité aveuglante percent les nuages qui nous surplombent. La pluie forme un rideau dense devant nous et l’eau s’accumule rapidement sur la chaussée. Une seconde alerte de tornades est émise sur nos cellulaires et à la radio.
Nous entrons donc dans un quartier résidentiel en panne de courant où retentissent des sirènes anti-tornades, un son que nous ne connaissions pas, mais qui donne froid dans le dos. Nous nous résignons à abandonner l’auto et la roulotte pour demander refuge dans une maison. Serge sort du véhicule et va de porte en porte en espérant que personne ne soit armé et surprotectionniste de sa propriété…
Une famille nous ouvre enfin sa porte et accepte que l’on se réfugie chez elle. Serge nous fait signe de le rejoindre. Noé et moi quittons la voiture en courant dans le bruit angoissant des sirènes et du vent qui siffle de plus en plus fort. Détrempées en quelques secondes, nous voyons à peine devant nous avec cette pluie torrentielle qui nous frappe le visage. Frigorifiés et dégoulinants, nous sommes maintenant tous les trois dans le portique de ces bons samaritains. Quelques salutations d’usage entre inconnus pris au milieu d’une catastrophe naturelle et nous nous retrouvons tous dans la cuisine devant la porte patio, regardant mère nature se déchaîner en espérant éviter le pire. La petite dernière de leur famille est terrifiée. Le père nous explique qu’elle est craintive depuis une forte tornade en janvier dernier. Rassurant ! L’enfant se colle contre Noé et demande d’aller au sous-sol de la maison. Le paternel lui secoue plutôt les cheveux vigoureusement, technique de réconfort qui nous semble très peu efficace dans les circonstances, mais n’ayant jamais éduqués des enfants dans ce contexte météorologique, qui sommes-nous pour en juger ?
L’hôte qui aborde une moustache tout aussi imposante que la tempête, dépose son cellulaire sur la table de cuisine. Sur son écran, il nous montre une image satellite de la région en nous indiquant que la zone de tornades potentielles est celle en rouge. Nous lui demandons donc où nous sommes sur cette carte et il nous répond: » Belvidere, right in the middle of the red zone. » Encore une fois, très rassurant !
Le moustachu bienveillant nous raconte que des sirènes anti-tornades sont installées dans la ville depuis 1967 alors qu’une tornade a frappé de plein fouet l’école secondaire, engouffrant mortellement sur son passage les écoliers qui prenaient place dans les autobus scolaires bondés à la sortie des classe. Abasourdis par ce récit, nous regardons le ciel qui semble un peu plus clément depuis quelques minutes.
Reconnaissants, nous quittons nos hôtes en quête d’une chambre d’hôtel pour la nuit. Or, sur la route, le vent et la pluie reprennent de plus belle. Arrivés à l’hôtel, nous quittons donc la voiture rapidement, oubliant au passage que les phares, la glacière électrique, ainsi que le frigo de la roulotte sont demeurés en marche… Oui, vous avez bien deviné, la batterie était à plat au moment de notre départ le lendemain matin.
Le survoltage effectué sur la voiture pour nous permettre de repartir a endommagé le frein d’appoint ajouté pour la roulotte. Par conséquent, les lumières de freins de la voiture et de la roulotte ne s’allument plus. Croyez-le ou non, les lumières de freins sont un élément non négligeable sur un véhicule routier, à tel point qu’il refuse de bouger lorsqu’elles ne fonctionnent pas. En fait, le sélectionneur de vitesse reste à « P ». Vous aurez beau frapper dessus, tirer avec vos dents, lui parler en douceur ou l’engueuler, rien n’y fera, croyez-nous ! Toutefois, en bons élèves que nous-sommes, avec l’aide de YouTube et du manuel du propriétaire de la voiture, nous avons appris à contourner ce mécanisme de protection à l’aide d’un tournevis ! Quoiqu’il en soit, il a tout de même fallu se rendre chez un concessionnaire Subaru, qui nous a confisqué la voiture pour la nuit en raison de notre négligence et notre rudesse. C’est qu’il faut les chouchouter ses engins ! Bref, nous sommes maintenant de retour sur la route et nous prévoyons arriver à Banff dimanche si aucune tornade ne croise notre chemin d’ici là!